Dimanche
20
mar 2016
Jamet le dimanche ! - Un quinquennat de quatre ans
Jamet le dimanche !
20 mars
Un quinquennat de quatre ans
Dominique Jamet, vice-président de Debout la France depuis 2012
mais également journaliste depuis... toujours tient chaque semaine sur
le site de Debout la France une chronique où il commente très librement
l'actualité politique.
Au lendemain des attentats de Paris, le président
de la République annonçait aux parlementaires réunis en Congrès à
Versailles et encore sous le choc son intention de leur soumettre
rapidement la constitutionnalisation de l’état d’urgence et de la
déchéance nationale. Dans le climat du moment, ce projet qui semblait la
première étape d’un plan général de lutte, de prévention et de
répression du terrorisme djihadiste suscitait l’approbation générale et
les ovations des élus de la nation. La suite a révélé les failles, les
insuffisances et l’incohérence des mesures envisagées. Quel intérêt de
priver de leur nationalité française une poignée de binationaux qui
n’avaient que faire de cette sanction, qui s’en enorgueillissaient même
et qui se satisferaient de conserver leur nationalité d’origine et les
droits y afférents ? Comment pouvait-on l’épargner en revanche, par
crainte de créer des apatrides, aux Français de souche qui, en prenant
les armes contre leur pays, s’excluaient de la communauté nationale ?
N’était-il pas plus simple et plus logique de prévoir pour les uns comme
pour les autres la même peine d’indignité nationale ?
Quoi qu’il en soit, ce débat, après avoir donné
lieu à des discussions aussi byzantines que passionnées, est devenu
sans objet puisque le Sénat ayant refusé de voter le projet
gouvernemental dans les mêmes termes que l’Assemblée, il est désormais
exclu que celui-ci soit adopté à la majorité requise des trois
cinquièmes. La révision à laquelle François Hollande voulait attacher
son nom n’est plus qu’une peau de chagrin et le chef de l’Etat n’a plus
le choix qu’entre deux options également fâcheuses pour lui : soit
convoquer le Congrès avec pour ordre du jour la constitutionnalisation
parfaitement superfétatoire de l’état d’urgence, une réforme sans
intérêt du Conseil supérieur de la magistrature et être très ridicule,
soit renoncer, reculer et être encore plus ridicule. La deuxième option
semble actuellement la plus probable.
Il y a à peine un mois, Manuel Valls empoignait
son clairon et sonnait la charge. La grande réforme dont il confiait le
destin à la débutante El Khomri allait bouleverser le droit du travail,
introduire la flexisécurité en France et du coup résoudre la crise de
l’emploi. Le Premier ministre était résolu à « aller jusqu’au bout. » Au
besoin il recourrait au 49.3. Le grand patronat applaudissait. La
vieille gauche, toujours présente, -les syndicats, les frondeurs, les
révolutionnaires – se mobilisait, la jeune gauche, déjà si vieille –les
lycéens, les étudiants – se rebiffait. Un mois plus tard, le projet
historique, vidé de sa substance sous la pression de la rue, n’est plus
qu’un emplâtre sur un cancer. La droite, qui se disait prête à le voter,
ne le reconnaît plus. La gauche, encouragée par cette victoire à la
Pyrrhus, se satisfait d’avoir fait reculer l’exécutif mais le considère
dorénavant avec suspicion. La loi, telle qu’elle sera finalement
adoptée, n’entraînera aucune embauche authentique et n’aura aucune
efficacité contre le chômage. Son seul intérêt, aux yeux de son
promoteur et rewriter, est de créer, une fois de plus aux frais du
contribuable, les quelques emplois artificiels et provisoires qui, avec
l’aide des statistiques fallacieuses de l’INSEE, lui permettront de
légitimer sa candidature en 2017.
Les choses sont claires. Le président, qui a
perdu le soutien de sa majorité sans obtenir en échange celui de
l’opposition est hors d’état de présenter quelque grande réforme que ce
soit. S’il la présente, elle ne sera pas votée, ou alors si édulcorée
qu’elle n’aura plus ni sens ni effet. Si d’aventure elle est votée, ce
sera trop tard pour être appliquée. Il ne se passera plus rien sur le
plan intérieur d’ici l’élection présidentielle.
En politique étrangère, la France de M. Hollande
n’existe plus. Son arrogance et son aveuglement dans le dossier syrien
l’ont exclue aussi bien du règlement militaire que de la solution
politique du conflit. Mais le pire est ailleurs. Le fameux moteur
franco-allemand, axe central de l’Union européenne, toussait depuis
quelque temps. Il vient de caler sur le problème des migrants. Au volant
de sa puissante Mercédès, Angela Merkel a fait chancelier seul. Sans
mandat et sans concertation, la femme la plus puissante, dirigeante du
pays le plus puissant du Vieux continent a négocié et conclu avec le
sultan turc un accord qui engageait l’ensemble de ses partenaires, et
les Vingt-Huit, intimidés et bluffés, se sont résolus à entériner la
construction de l’invraisemblable usine à gaz échafaudée à Berlin et
Ankara, qui prévoit le refoulement pour favoriser la réadmission ! La
France, en la personne de son président, s’est inclinée.
Désigné de justesse en mai 2012 pour présider à
nos destinées jusqu’en mai 2017, le président, qui a pour lui la
Constitution et n’a contre lui que le pays, a choisi d’aller au bout,
sinon de son programme, au moins de son mandat. L’année qui vient sera
une année perdue pour la France, une de plus. François Hollande a
inventé le quinquennat de quatre ans sans en tirer les conséquences.
Pourtant, comme les plaisanteries,, les mauvais quinquennats les plus
courts sont les meilleurs.
A en croire Le Parisien de samedi, un élu
socialiste proche de l’Elysée confiait : « S’il renonçait au Congrès,
ce serait un terrible aveu de faiblesse. Le président serait à
poil ! »(sic). Eh oui, le trône est vide, le roi est nu. Et ce n’est pas
beau à voir.
Dominique Jamet