Dimanche
17
juil 2016
Jamet le dimanche ! Des tigres de papier
Dominique Jamet, vice-président de Debout la
France depuis 2012 mais également journaliste depuis... toujours tient
chaque semaine sur le site de Debout la France une chronique où il
commente très librement l'actualité politique.
Jeudi 14 juillet,
13 heures 30 : le président de la République annonce la prochaine levée
de l’état d’urgence. Jeudi 14 juillet, 22 heures 30 : un fou furieux de
Dieu massacre près d’une centaine d’innocents sur la promenade des
Anglais, à Nice. Vendredi 15 juillet, 4 heures du matin : le président
de la République annonce la prolongation de l’état d’urgence.
Parce que le
dernier attentat djihadiste de masse en France remontait à la
mi-novembre 2015, parce que les vigiles apostés à la porte des magasins
et les militaires qui tournaient en rond sur le parvis des
gares n’avaient servi de cibles à aucun illuminé de l’obscurantisme,
contre toute attente et toute raison, parce que les multitudes
réunies dans les stades et les « fan-zones » par l’Euro de football,
contre toute prudence et toute raison, n’avaient été l’objet d’aucune
agression, en dépit du récent assassinat d’un couple de policiers à
Magnanville, M. Hollande nourrissait-il l’illusion d’en avoir fini avec
le terrorisme ? L’événement lui a infligé la plus cinglante et la plus
sanglante des piqûres de rappel.
François Hollande
est le plus impénitent et le plus incurable des optimistes. Nul doute
que dans la vie privée cet heureux caractère rende sa
fréquentation fort agréable. En tant que personne et qu’homme public,
nul doute non plus qu’il préférerait vivre en paix dans un pays en paix
et ne pas avoir à constater, à déplorer et à enterrer de plus en plus
fréquemment les victimes du fanatisme. Malheureusement pour lui et pour
nous, le chef de l’Etat n’a pas les vertus que l’on est en droit
d’attendre et même d’exiger de lui. Du commandant en chef des armées, en
temps de guerre, plutôt que de vaines et plates paroles de compassion,
plutôt qu’une présence assidue à des obsèques on attend le réalisme, la
lucidité, l’autorité, la décision, l’action. La bonne volonté ne suffit
pas là où manque la volonté.
Brutalement tirés
de leur torpeur euphorique par le drame de Nice, qui succède à des
drames récents et annonce les drames à venir, le président de la
République et son Premier ministre ont brutalement redécouvert et nous
serinent d’interview en allocution que « nous sommes en guerre ». Nous
ne le savions que trop, ils semblaient ne pas le savoir assez.
Cette guerre,
nous disent les experts, est asymétrique. Elle l’est de plus d’une
façon. Parce qu’elle oppose des Etats démocratiques, des armées
régulières, une police et une justice respectueuses du droit à une
organisation criminelle qui ne respecte aucune valeur morale, qui
recourt à toutes les armes à sa disposition et ouvre aux assassins les
portes de son paradis. Parce que, Dieu merci pour nous, notre
supériorité matérielle et technique sur Daech est écrasante – pourvu que
ça dure. Mais aussi, et malheureusement pour nous, parce que notre
adversaire nous fait vraiment la guerre, en utilisant tous ses moyens,
toutes ses forces, tous ses adeptes, tous ses fidèles sans jamais
relâcher son effort, sans jamais baisser sa garde, sans jamais désarmer
sa haine, alors que nous le combattons à temps partiel, à effectifs
réduits, et un bras dans le dos.
Dépassé une fois
de plus, François Hollande, quasi-machinalement, a parlé d’intensifier
la lutte contre le soi-disant Etat islamique en Irak et en Syrie. Fort
bien, encore que ce conflit ne puisse se solder par une victoire sur le
terrain que si tous les Etats civilisés, et même ceux qui le sont moins,
prétendument coalisés contre Daech unissent leurs efforts et commencent
pas s’entendre sur l’identité d’un adversaire qui est la plus complète
incarnation du Mal sur terre depuis la défaite et la disparition du IIIe
Reich nazi.
Mais c’est chez
nous, sur notre sol, c’est en France que le combat doit, d’urgence,
changer d’intensité et de nature. C’est dans nos rues, c’est dans nos
prisons, parmi nous, mêlés à nous, parfois relativement faciles à
reconnaître, parfois dissimulant habilement leurs intentions, que
vivent et que tuent des criminels qui haïssent indistinctement le pays
qui les abrite, la population qu’ils côtoient, nos mœurs, notre culture,
notre civilisation. C’est là qu’il faut frapper, c’est là qu’il faut,
en répondant à la guerre qui nous est faite par la reconnaissance de
l’état de guerre, traquer, frapper et mettre hors d’état de nuire, sans
faiblesse et sans hésitation, ces féroces soldats qui viennent jusque
dans nos bras…
Le gouvernement
actuel, comme ses prédécesseurs, avance qu’il fait ce qu’il peut. Qu’il
fasse désormais ce qu’il doit. S’il n’est ni consciemment ni
délibérément coupable des victimes qui s’accumulent sous ses yeux
impuissants, qu’il se souvienne qu’il est comptable et responsable de la
protection, de la sécurité, de la vie des Français, sous peine, s’il
fait défaut, de déclencher et de subir leur juste colère. Nous ne vivons
pas des jours ordinaires. Nous n’avons que faire des gens ordinaires.
Notre Premier
ministre se targue d’une filiation sentimentale et spirituelle avec
Georges Clemenceau. De l’héritage d’un homme qui, appelé au pouvoir en
temps de guerre, fit en effet la guerre, il ne semble avoir retenu que
les sourcils froncés et les coups de menton. Celui que l’on surnommait
le Tigre n’était pas un tigre de papier.