"Soyons fermes, purs et fidèles ; au bout de nos peines, il y a la plus grande gloire du monde, celle des hommes qui n'ont pas cédé." Charles de Gaulle.

dimanche 4 octobre 2015

Jamet le dimanche ! - A propos d'une Moranerie
4 octobre 2015
Dominique Jamet, vice-président de Debout la France depuis 2012 mais également journaliste depuis... toujours tient chaque semaine sur le site de Debout la France une chronique où il commente très librement l'actualité politique.
Pour Charles de Gaulle, la politique de la France ne se faisait pas à la corbeille (de la Bourse). Elle ne se faisait pas davantage à la télévision et c’est bien à contrecœur qu’il se résigna, mis en ballottage au premier tour de la première élection présidentielle au suffrage universel, à faire campagne en 1965 sur le petit écran. Autres temps.
On ne voit pas le général répondant à l’invitation du malicieux Laurent Ruquier pour se laisser tourner et retourner sur le gril pendant une heure par le chef d’orchestre d’On n’est pas couché et ses deux accompagnateurs. Mais qui, et notamment quel homme politique  pourrait en ignorer l’audience, la rançon de son succès étant  que le moindre propos un peu leste,  un peu violent, un peu personnel, un peu déviant, un peu original tenu au cours de cette émission de divertissement déclenche aussitôt les réactions du microcosme politique, met en émoi la sphère médiatique et se répand comme une traînée de poudre à travers la galaxie des réseaux sociaux. Eh oui, les temps ont changé !
Habituée d’ONPC, et vieille routière de notre paysage politique, Nadine Morano est bien la dernière à ignorer que si elle a son rond de serviette sur le plateau de France 2, c’est qu’on attend d’elle la petite phrase ou la grosse bourde, la moranerie –faut-il écrire la morânerie ? - qui fera le buzz, comme on dit en franglish. Le moins que l’on puisse dire est que samedi dernier, elle n’a pas déçu ses hôtes. Il faut reconnaître à l’ancien ministre de la Famille, jadis fidèle et protégée de Nicolas Sarkozy, le mérite, ou le défaut, telle une jument de race, de ne pas dérober devant l’obstacle. Cette fois encore, elle a foncé… et elle a chuté.
En évoquant une « France judéo-chrétienne et de race blanche », Nadine Morano a commis deux erreurs.
Une erreur de fait : la France où nous vivons, la France où elle vit, n’est plus, quoi qu’on en pense, ce vieux pays terrien, rural, de peuplement homogène, attaché à sa culture, à sa langue, à ses traditions, à son histoire. La France actuelle, multiconfessionnelle, multiculturelle, multiethnique, largement fragmentée, travaillée par les tentations communautaires, métissée, ne se ressemble plus. Une responsable politique ne devrait pas l’ignorer.
Une erreur d’appréciation. En prononçant un mot interdit –« race »– et en l’associant à un  autre mot  -« blanc » - qui fait voir rouge  à certains (la toute nouvelle présidente de France Télévisions, Mme Ernotte, à la fois féministe, leucophobe et jeuniste, ne s’est-elle pas dite choquée du nombre de mâles blancs de plus de cinquante ans qu’elle croise sur ses lieux de travail ?) Nadine a toujours Morano se doutait bien qu’elle allait susciter quelques remous. De fait, les hystériques de la bien-pensance, les chiens de Pavlov du politiquement correct, aboyant en meute à la mort, ont dénoncé à l’unisson un vocabulaire et un discours qui ne pouvaient manquer de leur rappeler les jours les plus sombres de notre histoire et de faire le jeu du Front national. Ces réactions sont aussi prévisibles que celles du papier tournesol de nos cours de chimie.
Ce que Nadine Morano n’avait nullement anticipé, c’était la violence et surtout l’unanimité de la condamnation que prononceraient contre elle les dirigeants de son propre parti. Qu’il soit entré dans le lynchage auquel nous avons assisté quelques querelles ou revanches personnelles contre une femme brute de décoffrage qui a toujours été traitée de haut par les petits marquis et les grandes dames du RPR, de l’UMP et désormais de « Les Républicains ». Le courant était d’une telle force qu’après avoir balancé pendant trois jours, Nicolas Sarkozy, décidément plus assuré de ses ambitions que de ses convictions, a fini par tourner avec le vent et par baisser le pouce, tel un empereur romain condamnant un chrétien à être dévoré par les lions et les hyènes.
L’épisode, en définitive, est moins intéressant par ce qu’il nous dit de Nadine Morano que comme révélateur de ce qu’est devenu un mouvement qui, osant parfois encore se dire héritier du gaullisme, en a détourné l’héritage. « Les Républicains » se sont démasqués. Ce parti, ou plutôt cette juxtaposition d’écuries qui ne sont soudées que par l’adhésion à tel ou tel entraîneur et l’espérance du pouvoir, n’a plus rien de national, d’enraciné, de patriotique, bref de gaullien. Peu importe aux aparatchiks ce que leurs chefs de file ont déjà fait et ce qu’il adviendra de la France, blanche, noire, indépendante, soumise, grande, démissionnaire, forte ou malade, pourvu qu’ils y aient leur place. Reste à savoir si leurs électeurs les suivront jusqu’au bout de leur pente.
Dominique Jamet