"Soyons fermes, purs et fidèles ; au bout de nos peines, il y a la plus grande gloire du monde, celle des hommes qui n'ont pas cédé." Charles de Gaulle.

vendredi 25 juin 2010

COMMISSION PERMANENTE ET SEANCE PLENIERE DU 24 et 25 JUIN 2010


Intervention de Jean-Luc Manoury

Mise en œuvre des politiques régionales : GECI Aviation

Monsieur le Président, Chers Collègues,

Après une séance plénière le 07 mai 2010 octroyant une avance remboursable à la société GECI aviation de 9,1 ME, on nous demande aujourd’hui d’autoriser le Président à solliciter l’avis du Conseil d’Etat en vue d’une prise de participation de la région lorraine au capital de cette même entreprise à hauteur de 7ME afin d’amorcer et de consolider la filière aéronautique lorraine.

Le Front national, certes, reconnaît la pertinence de créer autour du projet GECI Aviation, une dynamique de développement en s’appuyant sur le cluster AERIADES mais il est troublé par cette propension à la précipitation.

Ce pari sur l’avenir, se fera peut être au détriment d’autres projets, d’autres territoires lorrains et l’obligation de création d’emplois ne portant que sur 313 postes en CDI, durant trois ans.

Le groupe Front national n’est pas le seul à émettre des réserves puisque le conseil municipal de la petite commune de Puxieux dans le canton de Chambley- Bussières a donné un avis négatif à cette intégration dans le capital de l’entreprise et le CES considère que le rôle d’actionnaire comporte des risques.

A ce propos, il demande d’ailleurs un audit économique indépendant du projet comprenant un plan de financement en évaluant notamment ses répercussions en termes de sous-traitance.

Aurions-nous comme actionnaire minoritaire, notre mot à dire sur les orientations stratégiques à venir.

Vous aviez pourtant un soutien quasi général lorsqu’il y a un peu plus d’un an, on nous annonçait l’implantation de l’avionneur à Chambley.

Les négociations ont été menées sous l’égide de Jean-Louis Borloo, Ministre de l’écologie en liaison avec les élus de la région lorraine et l’œcuménisme bienveillant de Jean-Pierre Masseret et de Gérard Longuet avec le soutien de Nicolas Sarkozy au salon du Bourget.

Souvenons nous une dernière fois de l’image peut être un peu artificielle et finalement assez belle d’un Conseil régional rassemblé pour annoncer la bonne nouvelle dans un ciel où s’amoncelait les nuages noirs de la crise économique.

Depuis, nous avons tous ici l’impression d’une occasion manquée.

Ce dossier est une démonstration du mode de gouvernance pour le moins hasardeux dans lequel on met en avant le coup médiatique au détriment de l’action politique concertée.

Nous avons en effet tous l’impression ici que vous avez cherché à jouer personnel, Monsieur le Président.

En vous appropriant un projet d’intérêt majeur pour en faire un simple argument électoral, vous avez détruit la dynamique qui s’était nouée.

Est-ce du à la gestion hasardeuse du projet ?

Là encore, de l’annonce de l’implantation à la situation actuelle, c’est la désillusion qui prédomine.

On nous annonçait un projet technique bien ficelé, des financements sains, des créations d’emplois massifs…

On se retrouve aujourd’hui avec des procédures de fabrication en cours de certification pour une durée indéterminée, avec des subventions publiques qui ne cessent de s’accroître, mais aussi avec de moins en moins d’emplois crées en raison d’un processus poussé de sous-traitance et d’externalisation qui peut hélas conduire les chaînes de production des sous ensembles à s’installer en zone dollars.

Lorsque j’entends parler du skylander comme de « la Logan de l’aviation », je suis dubitatif.

La Logan est en effet produite en Roumanie, en Russie, au Maroc, en Colombie, au Brésil et en Inde mais pas en France, malgré les sommes colossales injectées dans la filière automobile.

Thierry Gourlot vous a exposé notre position de principe, notre enthousiasme, notre espoir.

Il est vrai que nous avons tous applaudi lorsque vous avez indiqué qu’un industriel viendrait s’implanter en Lorraine pour mener à bien son projet et qu’il demanderait au Conseil régional un coup de pouce.

Notre soutien était alors une aide bienveillante.

Nous constatons, une inflation de l’aide publique.

La Lorraine a déjà engagé 30 millions d’euros dont la moitié concerne la construction de locaux et la viabilisation pour acheter ce site de 500 hectares, le dépolluer, le rénover et l’aménager.

C’est la création à long terme de 4 zones d’activités dont le pôle aéronautique avec une triple vocation industrielle, événementielle et ludique.

Membre de la Commission des marchés publics et ne participant pas au vote, je peux constater que l’événementiel peut avoir son charme mais aussi un coût.

Les trois manifestations Musika Madine, A l’air du développement durable et Chambley planet’air days coûtent à la collectivité plus d’un million d’euros.

Et pour prendre un seul exemple : l’avenant pour la réalisation d’une piste ULM à Chambley, c’est plus de 25% soit près de 162 000 euros supplémentaires.

Pourquoi cette imprécision, ce flou, cette opacité dans l’exposé des avancées du projet ?

Pourquoi ne pas nous avoir dit que la certification prenait du retard ?

Pourquoi ne pas avoir dès le début évalué correctement le montant de la participation du Conseil Régional pour ce projet ?

Maitrisez-vous vraiment ce dossier ? Car vous semblez faire preuve d’une légèreté qui choque même votre majorité.

Vous vous laissez bercer par des espoirs sans oser regarder la réalité en face et analyser la situation.

Vous ne faites pas confiance à cette assemblée dont nous sommes pourtant des représentants élus, dans leurs spécificités politiques, mais aussi et surtout dans les efforts financiers consentis pour la région au travers de l’impôt.

Un projet de cette ampleur ne peut se faire dans le bricolage.

Voilà toutes les raisons Monsieur le Président qui nous incitent à la méfiance et qui nous font douter.

Mais nous voulons croire au projet, avec espoir comme Thierry Gourlot ou avec circonspection en ce qui me concerne mais prêt revenir à ma première impression si vous savez me convaincre.

La balle est dans votre camp.

Montrez- moi que vous êtes meilleur buteur que l’équipe de France ?

Je reconnais que ce n’est pas difficile et que je vous simplifie la tâche ?

Notre groupe se résout à ne pas détruire vos efforts réels et si vous voulez autant que nous voir le Skylander décoller, vous ne pouvez négliger les interrogations légitimes des deux assemblées que sont le CES et le CRL.

Votre devoir est de prendre en compte nos interrogations et de rectifier votre plan de vol pour que le Skylander ne soit pas un avion « furtif » avec du plomb dans l’aile.

Comme le disait Jean Rostand : « l’obligation de subir nous donne le droit de savoir »

Je vous remercie pour votre attention.