"Soyons fermes, purs et fidèles ; au bout de nos peines, il y a la plus grande gloire du monde, celle des hommes qui n'ont pas cédé." Charles de Gaulle.

dimanche 7 février 2016

Jamet le dimanche ! - Aveugles et paralytiques.


Dimanche 7 février

 Dominique Jamet, vice-président de Debout la France depuis 2012 mais également journaliste depuis... toujours tient chaque semaine sur le site de Debout la France une chronique où il commente très librement l'actualité politique.

Pourquoi faire compliqué quand on peut faire simple ? C’est ce que dit le sens commun.

Pourquoi faire simple quand on peut faire compliqué ? C’est le péché originel de notre technocratie.

Lorsque, le 16 novembre dernier, trois jours après les attentats de Paris, le président de la République, devant le Congrès solennellement réuni à Versailles, annonça son intention de constitutionnaliser l’état d’urgence et la déchéance de nationalité des auteurs d’actes terroristes, même nés français, cette déclaration, qui semblait indiquer une volonté enfin arrêtée et une fermeté toute nouvelle fut applaudie par l’ensemble des parlementaires, debout, encore sous le choc de l’événement et communiant dans une rare atmosphère d’unanimité nationale.

Quelques jours suffirent pour faire apparaître les failles du discours présidentiel. François Hollande avait parlé avant de réfléchir et sans même avoir consulté ou écouté des juristes compétents. Son projet, tel qu’il l’avait présenté, souffrait de trois défauts rédhibitoires. Il menaçait les djihadistes à venir d’une peine dont ils se souciaient comme un poisson d’une pomme. Quand on est décidé à tuer et à mourir contre sa patrie, on n’a que faire de se voir privé d’une nationalité que l’on a rejetée. Donc, inefficacité. Il était prévu de sanctionner des actes identiques par des peines différentes suivant que leurs auteurs jouissaient ou non de la bi-nationalité. Donc, iniquité. Deux articles de notre Code civil prévoyaient déjà la déchéance de nationalité. Donc inutilité.

Tout individu de bon sens aurait donc conclu de ces données qu’il suffisait d’actualiser ou de préciser par le biais d’une loi ordinaire – ne sommes-nous pas dans une démocratie parlementaire ? – ces dispositions et de stipuler que tout acte terroriste qualifié de crime, reconnu comme tel et puni d’une peine supérieure à un certain quantum (par exemple dix ans de prison) serait automatiquement assorti de la perte des droits civiques. Que si l’on adoptait le principe de la déchéance de nationalité pour tous, il fallait de surcroît dénoncer la convention sur l’apatridie. L’affaire était simple et le consensus assuré.

Au lieu de quoi le gouvernement a persisté à porter son projet sur le terrain constitutionnel, à laisser s’engager, se développer et s’envenimer une discussion de plus en plus byzantine qu’ont bientôt polluée calculs et arrière-pensées politiciens. et à alourdir notre loi fondamentale d’une addition parfaitement superflue. Pauvre Constitution, peu à peu transformée en fourre-tout, en placard à balais de principes, de valeurs et de dispositions qui n’ont rien à y faire ! Dans le grand marasme de notre industrie, les seules usines qui illustrent à leur manière notre redressement productif sont les usines à gaz. Et voilà comment, après l’épisode du mariage pour tous, notre roman-feuilleton national s’enrichit d’un nouvel et interminable épisode dont nous aurions pu faire l’économie. On amuse la galerie avec des niaiseries. Pendant ce temps, la maison brûle.

Nous avons un gouvernement qui, parfois, fait sans dire – peu de gens se sont avisés qu’avec l’accord tacite de l’opinion, la peine de mort sans jugement a été rétablie, à l’intérieur en cas de flagrant délit terroriste, à l’extérieur en vertu d’un droit de suite qui s’exerce en dehors du cadre de la loi – mais qui, beaucoup plus souvent, dit sans faire.

Alors que le Premier ministre, la mâchoire serrée, souligne son inébranlable volonté de fiers mouvements du menton, et que le chef de l’Etat, les yeux dans nos yeux, affiche son implacable détermination, les problèmes essentiels de la prévention et de la répression du terrorisme restent pendants.

Nous avons, en vertu de l’état d’urgence, suspendu les accords de Schengen, remettant à plus tard de les renforcer ou de les dénoncer. L’espace Schengen devait permettre la libre circulation, à l’intérieur d’une frontière commune, des ressortissants des Etats signataires, et non servir à la libre admission de millions de migrants et de tueurs perdus et dissimulés dans leur masse . Si la frontière extérieure n’est pas étanche, il faut rétablir un contrôle effectif de la frontière nationale. Ce n’est toujours pas le cas. On nous affole un peu plus tous les jours avec la croissance exponentielle du nombre des fichés « S » et des recrues des brigades internationales du djihadisme, sans en tirer aucune conséquence ni sur le plan de la prévention ni sur le plan de la répression. La machine judiciaire traite au compte-gouttes de rares dossiers. Peut-on croire sérieusement qu’une seule mosquée, en France, était justiciable de perquisitions et de fermeture ? Prédicateurs et fidèles salafistes s’inscrivent chaque jour un peu plus en marge de nos lois et de notre société sans susciter la moindre réaction policière, judiciaire ou politique. Le principe de laïcité, pourtant inscrit dans notre Constitution (tiens donc !) est quotidiennement bafouée par les communautarismes qu’on a laissés s’installer et se fortifier au sein et aux dépens de la communauté nationale. La sphère publique est entamée et envahie par des exigences, des revendications et des comportements collectifs qui n’auraient jamais dû sortir de la sphère privée. Le halal s’impose dans nos écoles, le hidjab et la burka dans nos rues, mais c’est la République qui se voile la face !

On connaît la fable de l’aveugle et du paralytique, l’un venant à l’aide de l’autre et faisant une force de l’addition de deux handicaps. Mais nous avons un gouvernement qui est à la fois aveugle, paralytique et, en prime, sourd. Que peut-il en sortir d’autre que de l’immobilité ?

Dominique Jamet