Dimanche
23
oct 2016
Jamet le dimanche ! Le trop plein
Dominique
Jamet, vice-président de Debout la France depuis 2012 mais également
journaliste depuis... toujours tient chaque semaine sur le site de
Debout la France une chronique où il commente très librement l'actualité
politique.
Il l’a d’abord déclaré dans la fièvre de la
campagne, il l’a répété dans l’euphorie de la victoire, puis il l’a
réitéré au point d’en faire non seulement le marqueur de son
quinquennat, mais la condition sine qua non d’une
éventuelle candidature à sa propre succession : il demandait à être jugé
sur ses résultats, et d’abord sur sa fameuse inversion de la courbe du
chômage. Fatale imprudence !
A l’heure des
comptes, le bilan de François Hollande le juge en effet. Et le condamne
sans appel. Entre le printemps 2012 et l’automne 2016, le nombre des
sans emploi s’est accru de six cent mille. Le budget de l’Etat est
toujours en déficit. Le montant et le poids de la dette publique se sont
aggravés. Huit millions de Français, qui tentent de survivre en-dessous
du seuil de la pauvreté, ont rejoint les rangs de la lamentable cohorte
des « sans-dents ». Le président de la République n’a pas tenu les
engagements du candidat.
Sur cette base, on
ne voyait plus très bien comment le chef de l’Etat sortant, qui en
crevait d’envie, pourrait justifier une nouvelle candidature qu’il avait
lui-même délégitimée d’avance et qui, de surcroît, ne pouvait guère
déboucher que sur une défaite humiliante pour l’homme et pour son camp.
Il était prêt, déclarait-il, dans une interview qui devait donner le
signal de son entrée en campagne…
Or, ce qui
paraissait déjà peu jouable il y a encore seulement quelques semaines
est soudain devenu impossible. Un gros livre révélateur a éclairé de la
lumière la plus crue un président pris au piège comme un lapin hagard,
tétanisé dans le faisceau des phares d’une voiture. A l’échec factuel
est venue s’ajouter la faillite morale. Sous le manteau du premier
magistrat de France, garant des institutions, chef des armées, est
apparu un bavard incontinent et inconséquent, cynique, manipulateur,
sans loyauté et sans convictions. L’homme qui murmure à l’oreille du
premier journaliste venu des secrets d’Etat a prononcé contre lui-même
une peine définitive d’indignité, voire de déchéance politique. François
Hollande n’est plus qu’un gros petit homme tout seul, perdu dans son
triste palais et dans des costumes pour lesquels il n’était décidément
pas fait. Alors même que son mandat court encore pour six mois, la
succession est ouverte et la guerre de succession lancée.
Certes, tout indique
que celui, ou celle, qui courra en avril prochain sous les couleurs
fanées du Parti socialiste, a peu de chances de se qualifier pour le
second tour de la présidentielle et, se qualifiât-il, de l’emporter. Les
candidats, déjà déclarés ou potentiels, ne s’en bousculent pas moins
au portillon de la primaire organisée par Jean-Christophe Cambadélis,
Jean-Marie Le Guen et autres arbitres insoupçonnables sous l’invocation
de la « Belle Alliance populaire ». Une fois de plus, à gauche comme à
droite, l’heure est au trop-plein prophétisé par le général de Gaulle.
Gérard Filoche,
Marie-Noëlle Lienemann ? Le premier est insupportable, la seconde
estimable. L’un et l’autre sont voués au destin sans gloire des seconds
couteaux qui rêvent d’être canifs à la place du canif.
Benoît Hamon, Arnaud
Montebourg ? Les critiques que les deux anciens ministres adressent au
président ne sont que trop fondées mais tous deux ont été trop proches
de lui pour être des opposants crédibles et s’en sont trop éloignés pour
rassembler leur propre camp.
Emmanuel Macron ? Un
pied dedans, un pied dehors, moitié oiseau et moitié rat, atout de
rechange des lobbies mondialistes, chouchou de Bruxelles après avoir
goûté du fromage de Hollande, Mozart de la trahison, le jeune prodige
plaît trop à la droite pour rallier l’électorat de gauche et s’est trop
compromis avec la gauche pour séduire l’électorat de droite.
Ségolène Royal ?
Elle en a rêvé, et de nouveau elle ne pense qu’à ça, autorisée,
autrement dit encouragée, par son ancien compagnon à ne respecter ni la
solidarité ni la discipline gouvernementales et à multiplier incartades
et provocations. Femme de caractère, il ne lui manque aucun des défauts
que l’on prête aux hommes politiques. En d’autres temps sa proximité
avec le chef de l’Etat aurait été un atout, elle la plombe aujourd’hui.
Le climat n’est pas à une transposition française du feuilleton Dynasty et la candidature de la Clinton nationale susciterait une hillaryté générale.
Reste Manuel Valls.
Sa position de chef de gouvernement l’habiliterait théoriquement, vu la
carence du président, à rassembler autour de lui ce qui reste de la
majorité, mais il semble bien qu’il y soit toujours minoritaire. Certes,
26% seulement des Français lui font confiance, mais telle quelle, sa
cote d’impopularité a de quoi rendre jaloux nombre de ses camarades à
commencer par son supérieur hiérarchique. Compte tenu du calendrier,
c’est maintenant qu’il devrait se déclarer. Mais peut-il le faire tant
que François Hollande ne l’a pas relevé de son serment de loyauté
personnelle ?
Or, M. Hollande, de
toute évidence, caresse encore et toujours, dernier à y croire, le rêve
devenu délirant d’une deuxième candidature et s’accroche aux derniers
lambeaux, aux dernières illusions d’un pouvoir dont il ne lui restera
rien le jour où il annoncera son retrait. Son seul plaisir, amer, est
d’occuper le terrain, la seule capacité qu’il conserve est la capacité
de nuire et de bloquer les autres compétiteurs. Etrange épreuve que ce
Grand Prix du Président de la République où tant de chevaux piaffent
d’impatience dans les starting blocks tandis que celui qui n’a pas
encore décidé s’il serait un simple spectateur ou un concurrent tient le
pistolet du starter mais se refuse à donner le signal d’un départ qui
serait aussi le sien.